Ce projet d’envergure avait pour but de regrouper et de mettre en scène la magnifique collection de sculptures de l’artiste Italien Antonio Canova au Musée Correr. Cette présentation permanente des oeuvres du plus grand sculpteur européen néoclassique est désormais accessible au public dans trois salles dont deux font partie par leur splendeur du Palais Royal ; la Salle du Trône et le Salon des paysages. Leur restauration, qui sera prochainement complétée par celle de la Galerie Napoléonienne, portera à vingt le nombre de pièces dont le Comité a financé la restauration dans le cadre de la réalisation du Grand Correr.
Le Palais Royal de Venise et le projet “Sublime Canova”
Orphée et Eurydice, Dédale et Icare, Pâris, la Vénus Italica, l’Amour ailé, les bas-reliefs de l’Iliade et l’Odyssée, de la mort de Socrate, les bustes de Sapho, de Madame Récamier, de la Vestale… le Musée Correr est l’un des plus riches du monde en oeuvres originales d’Antonio Canova, le plus célèbre sculpteur du dix-neuvième siècle avec Rodin et l’un des plus grands artistes néoclassiques, mais rares sont ceux qui le savent: éparpillés dans le musée, tels des objets décoratifs, ces chefs-d’oeuvres échappaient jusqu’à présent à l’attention des visiteurs.
La Directrice des Musées de Venise, Gabriella Belli, et le Conservateur du Musée Correr, Andrea Bellieni, ont donc décidé de les regrouper dans trois salles et de les mettre en valeur grâce à une muséographie bénéficiant des techniques contemporaines, tout en les replaçant dans un contexte néoclassique qui est celui du Palais Royal de Venise. Nul n’ignore en effet que le grand sculpteur Vénitien a travaillé pour Napoléon – le Pâris en particulier est une commande de l’Impératrice Joséphine, la Venus Italica de l’Empereur – et que c’est également sur son ordre qu’a été édifié place Saint Marc, de 1808 à 1814, le Palais Royal dont la façade qui fait face à la Basilique porte aujourd’hui encore le nom d’Aile Napoléonienne (Ala Napoleonica).
Deux des trois pièces destinées à recevoir la collection des Canova du Musée Correr faisaient partie de ce Palais Royal, longtemps oublié, et qui renaît depuis une quinzaine d’années grâce au Comité français pour la sauvegarde de Venise.
Baptisé « Sublime Canova », ce projet supposait d’abord que soient retirés de la Galerie de l’Aile Napoléonienne les bas-reliefs de l’Iliade et de l’Odyssée: à leur place, sera remonté un beau décor peint par les Vénitiens Borsato (auteur de l’ensemble du système décoratif du Palais) et Bevilacqua, dans le cadre d’une restauration réalisée en mémoire de l’historien de l’Empire Charles-Otto Zieseniss.
Des oeuvres aussi importantes que le Pâris et les bas-reliefs de l’Iliade ont pris place dans l’ancienne Salle du Trône, restaurée avec le soutien de la Compagnie Plastic Omnium, tandis que le groupe de Dédale et Icare occupe le centre du Salon des Paysages, rendu à sa splendeur initiale grâce à Eric et Caroline Freymond. Dans ces deux pièces, Giuseppe Borsato, disciple des créateurs du style empire Percier et Fontaine, a donné toute la mesure de son talent, réalisant des décors à la fois riches et joyeux, avec une grande variété de formes et de couleurs; et dans le Salon des Paysages, digne par sa somptuosité de la « Maison Dorée » de Néron, Borsato ne s’est pas refusé une pointe d’humour, représentant dans un « tondo » la place Saint Marc où flottent des gondoles par une journée d’acqua alta…
Les visiteurs de la Salle du Trône peuvent aussi admirer désormais un objet rare et précieux, offert au Musée Correr par le Comité français grâce au mécénat éclairé de M. Laurent Burelle, Président de Plastic Omnium: il s’agit d’un Nécessaire en vermeil pour le petit déjeuner réalisé spécialement par Odiot, le célèbre orfèvre de l’Empereur, pour Canova. Commandé en 1812 par la Comtesse d’Albany, épouse du Prétendant Stuart – qui aurait été Roi d’Angleterre si un catholique avait pu l’être -, il était destiné à remercier Canova pour son portrait du poète Alfieri, amant de cette mécène des arts. Placé dans un coffret portant l’inscription gravée « Al Signor Antonio Canova, la Contessa d’Albany », il passa par héritage à une nièce du sculpteur, épouse du N.H. Canal, patricien de Venise, et est demeuré dans sa descendance jusqu’à nos jours, absolument intact; un ami commun, Alberto Nardi, président de l’Association Piazza San Marco, a permis à Jérôme Zieseniss de nouer avec le Comte Canal une négociation au terme de laquelle cet objet historique franco-vénitien de grande qualité artistique a pu reparaître après deux siècles et être présenté pour la première fois au public.
Le Comité Français fait renaître le Palais Royal Place Saint-Marc